Dorothée Piot, dans l'Atmosphère des Bains
L'Interview Les Bains Guerbois avec Dorothée Piot
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DANS L'ATMOSPHÈRE DES BAINS PARIS
Vous avez créé la signature olfactive de notre Hôtel avec le parfum Atmosphère ainsi que deux Eaux de Parfum « 1885 Bains Sulfureux » et « 2013 Résidence d’Artistes ». Quel est le lien entre les trois créations ?
L'accord des bois, patchouli, cèdre, santal, et l'encens présents dans les trois créations.
Comment est née Atmosphère ?
J'ai tout de suite imaginé dans l'atmosphère tamisée des notes de bois, de cuir, une note épicée fraîche qui joue le contraste, et comme un échos aux volutes de fumée, des notes d'encens.
Quels étaient les inspirations pour créer « 1885 Bains Sulfureux » ?
J'avais envie de créer un parfum poudré, doux, baumé, réconfortant, musqué avec des accents aromatiques, romarin comme des fumigations.
Quels étaient vos inspirations pour créer « 2013 Résidence d'artistes» ?
C'est naturellement le travail des artistes qui m'a inspiré. J'ai voulu partir de bois plus bruts un peu râpeux, ligneux comme le cèdre et le patchouli. J'avais aussi en tête l'humidité des pierres froides, le côté sec des écorces de cannelle. J'ai facetté ces matières et assoupli avec des muscs.
Dans quel cadre avez-vous rencontré le fondateur de notre marque Jean-Pierre Marois ?
J'ai rencontré Jean-Pierre Marois pour la création de l'identité olfactive des Bains. Je connaissais "Les Bains" de renom, son histoire liée à tous ceux qui l'ont fréquenté. L'immeuble était alors en travaux et Jean-Pierre nous a ouvert les portes du lieu. J'ai trouvé ça assez dingue d'être là, de sentir encore cette atmosphère un peu sulfureuse, d'être privilégiée aussi de découvrir avant tout le monde le bâtiment rénové .
C'est un lieu inspirant magnifique au delà de son histoire.
Quel est votre plus beau souvenir olfactif ?
J’en ai de nombreux mais il en est un qui revient chaque été dans notre jardin en Normandie. Quand le soleil se couche, avec l’humidité qui tombe, l’odeur de la terre qui révèle tous les parfums emmagasinés dans la journée, les fleurs opulentes, l’humus, l’herbe coupée; c’est une émotion à chaque fois renouvelée. D’autres souvenirs aussi sont liés à la cuisine, épices, herbes aromatiques. C’est dans la cuisine et au jardin qu’est née ma passion pour les parfums.
Ou est-ce que vous avez appris ce métier ?
Deux parfumeurs sénior m’ont aidée à mes débuts.
Raymond Chaillan qui m’a transmis le goût des belles matières.
Martin Gras qui grâce à son enthousiasme m’a donné confiance en moi et j'ai pu alors mener à bout mes projets.
Pourquoi êtes-vous devenue parfumeur ? Quel était le moment déclencheur ?
Le parfum a des pouvoirs magiques insoupçonnés, provoquant des émotions indescriptibles; impalpables et je crois que j’avais envie de faire « battre les
cœurs ».
Le moment déclencheur a été celui d’une rencontre avec un parfumeur. Je ne savais pas qu’on pouvait en faire son métier. De cette rencontre est née ma vocation.
A quoi ressemble votre journée au bureau ?
Cela peut paraître répétitif mais en fait je mène plusieurs projets de front.
Le matin, j'évalue les essais de la veille, notes de fond et je rectifie les équilibres.
Je fais le point sur les créations en cours avec l'équipe commerciale et avec les marques qui nous ont confié les projets.
Comment vous découvrez des nouvelles matières premières ? Est-ce que vous avez un pays préféré ou une région que vous visitez souvent pour vous inspirer ?
J'ai la chance d'avoir à disposition dans ma collection des matières premières de grande qualité. Je suis curieuse de nature et quelque soit le lieu ou le pays où je me trouve mon "nez est en alerte".
Quelles sont vos matières préférées pour créer un parfum ? Pourquoi ?
A mes débuts, j'avais des à priori sur certaines matières et petit à petit je me suis rendue compte qu'en les utilisant, qu'en les apprivoisant, je découvrais des facettes intéressantes et qu'en surmontant la difficulté, je réussissais souvent à créer de beaux accords .
J'ai naturellement des matières fétiches, l'encens, les notes boisées comme le patchouli qui pour moi a de multiples facettes, les notes cuir.
Comment peut- on reconnaître votre signature olfactive ?
C'est difficile de répondre à cette question , on me dit souvent que c'est à travers mon travail sur les notes boisées, sur ma façon de les mettre en lumière, d'en mettre en valeur les facettes qu'on reconnaît mes créations.
Quelle différence, selon vous, entre la parfumerie commerciale et la niche ?
La parfumerie de niche nous permet d'explorer des accords plus singuliers, de façonner la matière.
Quel est votre conseil pour bien choisir son parfum ?
Prendre son temps, le suivre sur la peau mais aussi le vaporiser dans une pièce. Fermer la porte et ouvrir à nouveau pour le découvrir dans sa globalité. Ne pas chercher à reconnaître les ingrédients, se laisser aller et séduire ou non.
Où doit-on appliquer son parfum ? Le parfum peut se mettre sur les cheveux ?
Sur tous les points où passe une veine, les points de saignée, (à l'intérieur du poignet, au creux du coude, au creux du genou) sur les ourlets des vêtements, en touche légère sur les cheveux (ça dessèche les cheveux).
Un parfum évolue de la meme manière sur toutes les personnes ?
Les parfums n'évoluent pas de la même façon d'une personne à l’autre, sur ceux qui ont la peau très sèche, le rendu n'est pas le même. Sur deux personnes différentes, la perception de certaines matières premières est différente.
Pourquoi un parfum est construit en trois temps ? (tête, coeur, fond)
Le parfum doit être immédiat, bien entendu certains ont des dominantes de coeur ou de fond mais on attend qu'un parfum se découvre dès le départ.
Avez-vous un /des parfum(s) favoris ?
Oui, j'aime les notes chyprées, ce ne sont pas des parfums monolithiques. C’est comme un jardin anglais, on en découvre au fur et à mesure les facettes. J'aime les colognes et les notes boisées brutes.
Êtes-vous née avec un odorat plus développé ou cela peut s’apprendre ?
J'ai toujours eu la curiosité de sentir, je crois avoir développé ce sens au fur et à mesure et bien sûr il se travaille quotidiennement .
Un très grand merci à Dominique Ropion et les équipes Robertet pour cet interview !